Beaucoup de découvertes pour les EC1 de cette année à l'occasion du cours de civilisation : l'Espagne entre 1939 et aujourd'hui, de la dictature franquiste aux mutations sociales vertigineuses des dernières décennies. C'est une société complexe que ces étudiants ont commencé à mieux percevoir.
Le lundi 24 juin 2013, nous avons terminé cette année très studieuse par une sortie enrichissante aussi bien pour les étudiants que pour moi-même et Mme Pialoux qui m'accompagnait avec ses deux étudiants germanistes:
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Trajet à pied Châtelet-Hôtel de Ville. Recherche
des plaques en hommage à la Nueve. Topo EDM sur les Espagnols dans la
libération de Paris.
Des Espagnols dans la Libération de Paris (Début de mon intervention)
Si je vous dis Don Quijote, vous me dîtes :
Cervantes, 1615, le premier roman européen…
Si je vous dis Madrid, Guernica, Teruel… vous me dîtes
cités espagnoles…
Si je vous dis Ebro, Jarama, Belchite, Guadalajara…
vous me dîtes… batailles de la Guerre Civile espagnole qui aura vu s’affronter
républicains installés au pouvoir depuis 1931 et nationaux décidés à lutter
contre les forces de gauches laïques et progressistes depuis le Coup d’Etat
illégitime du 17 et 18 juillet 1936. Une guerre cruelle de 3 ans (1936-1939)
avec son million de victimes et ses 500 000 exilés qui débouchera sur une
longue dictature de presque quarante ans, celle du Général Franco.
Ce que le grand public ignore
souvent c’est que ces noms sont aussi ceux de véhicules blindés ou de tanks conduits
par des soldats espagnols républicains entrés dans la Résistance en France et
qui vont participer à la Libération de Paris en août 1944. Ce sont ces noms
écrits en majuscules sous le pare-brise ainsi que le drapeau de la République
espagnole peints sur les côtés des half-tracks que vont voir les Parisiens qui
accueillent en héros les combattants de la Division Leclerc...
La suite à l'occasion d'un cours ou d'une autre promenade thématique en 2014 puisque sera fêtée le soixante-dixième anniversaire de la Libération de Paris.
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Trajet à pied Hôtel de Ville-MAHJ.
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Quelques commentaires sur le Musée, sur
l’expo...
J'ai en effet rappelé que le Musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme a pour but de présenter les deux mille ans de vie des communautés juives de
France et de les situer dans l'histoire générale du judaïsme (stèles
juives du Moyen-Age qui disent la présence millénaire de la communauté juive à Paris); de conserver, étudier, diffuser et mettre en valeur des collections
muséographiques publiques ou privées, des fonds d'archives et de
documentation se rapportant à l'art et à l'histoire des juifs (Une
de L’Aurore avec le très célèbre
J’accuse de Zola du 13 janvier
1898 motivé par l’Affaire Dreyfus); d'organiser la diffusion et la rencontre de toutes formes
d'expressions artistiques se rapportant à la culture juive dans sa
diversité (les Juifs d’Algérie ou du Yemen, Chagall et la Bible, de
Superman au Chat du rabbin…).
D’où cette exposition que nous avons découverte qui n’a rien à voir apparemment avec le fait religieux, ce qui pouvait nous permettre de nous interroger sur « qu’est-ce que être
juif ? » et de nous demander si la présence de ces trois
photoreporters dans la Guerre Civile espagnole avait quelque chose à voir
avec le fait qu’ils étaient juifs.
Sans aucun doute. Rappelons que pendant
la Guerre civile, 35 000 volontaires vont prendre les armes pour
défendre la République de 1931 assiégée par les franquistes aidés des
nazis (Légion Condor à Guernica) et des fascistes italiens (défaite à
Guadalajara). Ils viennent de partout… parmi eux, 7 000 sont des
juifs communistes, socialistes, sionistes de gauche (Etats-Unis et
Amérique Latine, Europe, Palestine) qui savent que la lutte contre le
fascisme, l’antisémitisme, le totalitarisme, passe forcément par Madrid et
l’Espagne qui deviennent un enjeu international. Ce sont les Brigades
Internationales que vont saluer la Pasionaria, les grands poètes comme
Aragon, Neruda, Guillén : les juifs sont présents dans tous les
contingents nationaux, dans leur propre unité, la Naftali Botwin,
sous-section du Bataillon Dombrowski composée de juifs polonais, tchèques
et hongrois (« Pour votre liberté et la nôtre » en polonais,
yiddish et espagnol sur le drapeau de la Compagnie), dans les services
sanitaires, certains sont de grands chefs militaires comme les généraux
Lukacs ou Kleber, les commandants Boris Gimpel ou Milton Wolf. On trouve
aussi des juifs dans les milices anarchistes ou celles du POUM. De grands
artistes ou intellectuels juifs prennent fait et cause pour les
républicains espagnols : Albert Enstein, Marc Chagall, Arthur
Koestler. Radio Barcelona ira jusqu’à diffuser des émissions en yiddish.
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11H-12H30 : Visite guidée de
l’exposition sur la Valise Mexicaine de Capa en compagnie de Katia, une guide chilienne qui a su intéresser les élèves et mettre en valeur leurs connaissances souvent solides.
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13H : Repas Falafel dans la Rue des Rosiers
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14H30 : démarrage de la promenade
dans le Marais avec commentaires des professeurs et étudiants
volontaires : du Quai des Célestins à Châtelet.
Un parcours
dynamique, joyeux et tourbillonnant voulu par Patrick Bouchain, scénographe de l'exposition : c'est ce dont nous avons été témoins, malgré les scènes de combats, les marques de la fatigue, de la peur et de la faim sur le visage des miliciens républicains ou des femmes et enfants confrontés à la sauvagerie des affrontements. Nous avons tous été sensibles à la question de l'engagement, à travers l'expérience vécue en Espagne de ces trois jeunes gens
(Capa avait 23 ans et était hongrois, Tardo avait 26 ans et était allemande, Chim avait 25 ans
et était polonais), de la défense d’un idéal…
« Si ta photo n’est pas bonne,
c’est que tu n’étais pas assez près » disait Capa, le père des
photographes de guerre, juif hongrois antifasciste exilé à Paris en 1934, parti
couvrir la Guerre Civile en Espagne avec Gerda Taro et David Seymour. Tous
trois vont s’imposer comme les précurseurs du reportage de guerre : au
plus près des combattants (plus d’images figées et académiques) en mouvement
avec Capa et Taro, témoin de la tragédie des civils avec Chim.
Si la guerre
civile aura été un tournant dans l’histoire du monde confronté à la montée du
totalitarisme, elle aura aussi marqué en profondeur la conception de la
photographie de guerre (Capa et Chim seront parmi les fondateurs de l’Agence
Magnum en 1947).
Capa inconnu avant
1936, devient une légende en donnant ses lettres de noblesse au
photojournalisme : photos vendues sans les négatifs, légendes conçues par
le photographe, reportage à base de photos et non de texte. Ils inventent une
nouvelle façon de voir et travailler : raconter une histoire humaine, être
au cœur de cette aventure, choisir son camp. On sait que certaines images
isolées vont devenir des figures iconiques de la guerre civile comme le
Milicien fauché sur le front de Cordoue mais ce que nous a révélé l’expo est
un projet tout autre : concevoir la photo comme un scénario de film ou des
actualités filmées avec un récit émotionnel : séquences d’événements qui
vont être publiées dans la presse, notamment antifasciste, à travers le monde
entier. Nous avons pu voir des visages célèbres : Malraux, Hemingway,
Lorca mais surtout des Espagnols anonymes pris dans la tourmente des événements
internationaux.
• 13H : Repas Falafel dans la Rue des Rosiers
• 14H30 : démarrage de la promenade dans le Marais avec commentaires des professeurs et étudiants volontaires : du Quai des Célestins à Châtelet.